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L’origine démocratique du nationalisme

D’après Yves-Marie ADELINE

dimanche 4 mai 2008, par MabBlavet

Citation tirée de L’Aube Royale d’Yves Marie ADELINE, Ed. SICRE 1, Square Racan - 75016 PARIS, 1991 p.27-28

En Occident, l’expérience athénienne, contrairement à ce qu’il en apparaît, n’a fait que transférer cette sacralité du pouvoir, en la retirant des mains d’un homme pour l’accorder à l’État.

Dans cette ville qui, à bien des égards, annonce le Christianisme, à tel point qu’une bonne partie de son héritage reste vivant dans notre civilisation européenne, la dignité du citoyen prend une telle ampleur que le chef incontestable n’est plus possible : aucun citoyen d’Athènes ne peut avoir moins de dignité qu’un autre citoyen.

Mais cette dignité si étendue qu’elle neutralise les disparités, le citoyen la doit au seul fait d’appartenir à la ville d’Athènes.
De même que nous disons les hommes être égaux sous le regard de Dieu, de même les citoyens sont-ils d’égale dignité par la seule grâce d’Athènes.
Par conséquent, tous ceux qui ne sont pas d’Athènes, même s’ils sont de Grèce, seront des barbares, comme les Persans et tous les autres « barbares » : il y a, d’un côté, les Athéniens, et de l’autre, les métèques.

De cette sorte de dignité, nous ne pouvons pas dire qu’elle est assimilable à notre égalité devant Dieu, par-delà tout ce qui nous affecte en particulier : elle est issue exclusivement de l’appartenance à Athènes. En d’autres termes, si le citoyen n’obtient sa dignité que par sa nationalité athénienne, il reconnaît implicitement à Athènes cette supra-dignité qu’il méconnaît de Dieu, et qu’il refuserait a fortiori à l’un de ses semblables.

En se glorifiant ainsi, et jusqu’à l’excès, d’être athéniens, les citoyens sacralisaient Athènes. Leur Cité a su parvenir à tant de beauté, de force et de sagesse antique qu’elle est devenue un objet de vénération, de piété.

Avec la Révolution française, et le reflux des peuples vers la démocratie, la tentation athénienne se reconnaît intégralement, en ce qu’elle détermine un comportement de citoyen-type, équivalent à celui rencontré deux mille ans en arrière. Dans la célèbre phrase écrite sur la porte des maisons : « Ici, on s’honore du titre de citoyen », l’indigène se flatte insidieusement en sacralisant la cité à laquelle il appartient. Par ailleurs, l’hymne national de la République évoque l’« amour sacré de la patrie », dressant ainsi un autel à la dévotion de la Cité, par-delà toute morale, encourageant une xénophobie dirigée contre d’éternels métèques, et justifiant enfin la complicité de chacun dans toutes les entreprises, même injustes, par la seule vertu d’une citoyenneté commune.